Huit ministères et organismes gouvernementaux. 46 ordres professionnels. Six centrales syndicales. 18 universités. 48 cégeps. 61 centres de services scolaires. Des centaines d’acteurs des secteurs économiques, communautaires, du travail… L’écosystème de la formation continue est extrêmement complexe, si bien qu’il est difficile d’en avoir une vue d’ensemble.
« Si les différents intervenants autour de la formation continue connaissent mal le milieu où ils interviennent, ne se connaissent pas, imaginez ce qu’il en est pour un individu, une organisation, qui doit naviguer à travers ce système », a expliqué Julien Lambrey de Souza, directeur du Service de la formation continue et de la formation hors campus de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR). Cette méconnaissance engendre aussi une certaine concurrence entre les acteurs.
Pour l’occasion, le directeur a présenté les résultats préliminaires d’une étude menée par la Commission des partenaires du marché du travail du Québec (CMPT) qui sera officiellement publiée en octobre prochain. Un travail sur lequel a participé activement l’ACDEAULF, tout comme le Bureau de coordination interuniversitaire (BCI). Un bon point de départ, qui permet d’avoir une idée de la complexité de cet écosystème, note-t-il.
« Toutefois, à l’ACDEAULF, nous voulons prendre la bulle universitaire et l’éclater pour mieux comprendre comment les universités fonctionnent en formation continue, comment elles sont structurées, organisées, financées, etc. », a-t-il détaillé. En effet, la formation continue est un univers géométrie variable, alors que certaines universités y incluent des formations créditées, d’autres pas, a rappelé Biba Fakhouri, vice-doyenne à l’innovation, aux communications et à la formation continue de l’Université de Montréal.
Idem pour la clientèle de la formation continue, parfois définie comme les apprenants adultes ou non traditionnels, a-t-elle souligné. « Mais qui sont ces adultes ? Qui sont ces personnes au parcours non traditionnel ? Personnellement, je préfère parler de population étudiante aux parcours non linéaire, car ils peuvent se retrouver partout, non pas seulement dans les facultés d’éducation permanente. »
Dans cet écosystème, il ne faut pas négliger le secteur privé international, a ajouté Daniel Baril, directeur général Institut de coopération pour l’éducation des adultes (ICÉA). En effet, en plus des nombreuses institutions qui offrent de la formation continue, gravitent de grands joueurs du privé, comme LinkedIn ou Coursera, qui disposent d’importants moyens financiers pour la recherche et le développement.
La grande tendance est à la diversification, alors que la barrière de la langue s’atténue avec l’intelligence artificielle (IA), qui permet la traduction en simultané, note-t-il. « On voit aussi apparaître des acteurs qui sont segmentés et qui offrent des services dans une niche particulière, uniquement dans le mentorat ou la reconnaissance des acquis, par exemple. » Ce qui va aussi de pair avec une multiplication des approches, qui va du microlearning, aux programmes longs ou encore au hyflex, un modèle qui combine enseignement hybride et flexibilité. On voit aussi apparaître des classes intelligentes, où la technologie est carrément imbriquée dans les lieux physiques, dénote Daniel Baril. L’internet des objets, le big data et l’analytique en éducation sont aussi à surveiller.
Sous ces influences, les environnements personnalisés d’apprentissage commencent à faire leur apparition, combinant microlearning, programmes longs, présentiel, mentorat ou coaching, le tout orchestré par l’IA, poursuit-il. Ces robots peuvent être branchés pendant un échange sur Teams et apporter des compléments d’information aux participants, quand ils se posent une question. « L’IA pourrait même proposer un module de formation en ligne à compléter, puis faire passer un petit test de connaissance à la personne avant de lui octroyer un badge. »
Si bien que le concept d’apprentissage 3.0 — en ligne, accessible à tous, partout et en tout temps — commence à faire son apparition. « Le monde de l’éducation est dans une période de transition où les points de repère disparaissent. Je pense qu’il faut réinventer le système d’éducation pour former les Québécois du 21e siècle », conclut-il.