
Présentées par l’UQTR
La société évolue, la formation continue… Positionnement de la formation continue universitaire dans l’univers de l’apprentissage tout au long de la vie

Christian Blanchette
C’est sur ce thème que s’est déroulée la onzième édition des Journées d’étude de l’ACDEAULF, les 2 et 3 juin derniers. Après une année à distance, l’événement s’est tenu au campus de Québec de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Ces locaux tout neufs accueillent les étudiants depuis septembre 2021 au sein du centre commercial Fleur de lys. Une façon de se rapprocher de la communauté, comme l’a souligné Christian Blanchette, recteur de l’UQTR, en guise d’introduction. « Nous sommes situés dans ce qui a été le premier centre commercial de Québec, un lieu en revitalisation. Ce projet se construit en tenant compte de la mixité sociale, des besoins des milieux et en consultant les différents acteurs de la communauté. »
Cette antenne de l’UQTR offre donc un volet enseignement à ce secteur, qui comptera aussi sur une offre résidentielle et des services diversifiés. « L’université a un impact sur la société à court, moyen et long terme. Ce projet permet donc d’agir à court terme », a ajouté le recteur. De même pour la formation continue qui fait partie de l’ADN de cette institution, alors que 40 % des étudiants de l’UQTR sont inscrits à temps partiel, a-t-il rappelé. D’ailleurs, joignant le geste à la parole, le recteur a participé à toutes les activités au programme des Journées d’étude.
Christian Blanchette a aussi mis la table aux discussions entourant le rapprochement entre la formation continue universitaire et les responsables gouvernementaux de programmes pour les travailleurs. Un sujet qui a été abondamment traité pendant les journées d’étude. Déjà, le Bureau de coordination interuniversitaire (BCI) travaille avec le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS) pour faire en sorte que « les programmes de développement de la main-d’œuvre, les programmes qui soutiennent le développement de carrière, puissent aussi être ouverts aux universités », a-t-il rappelé. Un changement qui passe par les acteurs de la formation continue et qui risque d’essaimer, selon lui.
Thèmes présentés
- Chantier sur la formation continue
- Panel portant sur les conclusions des travaux de la CPMT
- Impact économique de l’apprentissage continu
- Formation continue et reconnaissance des acquis
- Hommage à Denis Sylvain
- La formation continue à l’université : entre structure et conjoncture
- Retour sur les conférences et échange sur l’évolution des pratiques en formation continue universitaire
Chantier sur la formation continue

Audrey Murray
Transition démographique, numérique et verte : alors que le Québec se retrouve à la croisée des chemins, la formation continue est un élément clé pour réussir à surmonter ces défis. Mais pour cela, il faut bien comprendre qui sont les différents acteurs du domaine. C’est d’ailleurs l’un des objectifs de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT), qui a lancé en 2019 un chantier pour mieux comprendre cet écosystème, a rappelé Audrey Murray, présidente de cet organisme public.
C’est en 2019, lors d’une rencontre entre différents ministères et acteurs de la formation continue que les participants ont réalisé qu’il était difficile d’avoir un portrait juste de l’offre au Québec. « Les acteurs ont constaté qu’on ne savait pas ce chacun faisait, qu’il y avait des préjugés, des frustrations et des dynamiques de concurrence, plutôt que de collaboration », a expliqué la présidente. Les participants ont donc décidé de mettre sur pied un chantier sur la formation continue assorti d’un plan d’action.
Première étape : cartographier des acteurs de la formation continue au Québec, ce qui permettra non seulement de mieux travailler ensemble, mais aussi de voir comment s’attaquer aux différents enjeux, a expliqué Audrey Murray. Déjà, certaines tendances se profilent, comme la croissance mondiale de l’offre et de la demande. « Nous avons constaté une forte poussée et la pandémie est venue accélérer le mouvement, si bien que les grands du numérique ont investi massivement en formation. On estime même qu’à l’échelle planétaire, le nombre de personnes qui auront recours à la formation continue va doubler pour traverser ces grands changements. »
De plus, les entreprises connaissent peu l’offre de formation et sont mal outillées pour diagnostiquer leurs besoins, constate Audrey Murray. Sans compter que les PME manquent de temps pour former leurs travailleurs, surtout dans un contexte de rareté de main-d’œuvre. Des réalités confirmées par un grand sondage mené ce printemps pour la CPMT auprès d’entreprises et d’individus ayant eu recours à la formation continue au cours de la dernière année. Le manque de temps, les modalités non adaptées à leur réalité et le coût élevé de la formation universitaire ont été identifiés comme les principaux freins par les étudiants.
De même, au moment de choisir une formation universitaire, 34 % des répondants ont trouvé difficile de déterminer si cela correspondait vraiment à leur besoin. Près du quart des répondants ont aussi trouvé qu’il était difficile de comparer l’offre. Autre fait saillant de cette recherche, qui devrait être rendue publique dans les prochains mois : le tiers des entreprises accordent peu ou pas d’importance à la formation continue.
Le chantier a aussi permis de créer des liens avec le monde universitaire, qui étaient peu représenté au sein de ces instances, a mentionné Audrey Murray. Depuis, le réseau universitaire est partie prenante des instances. Plusieurs programmes et appels de projets sont aussi ouverts à la formation continue universitaire, comme le programme PRATIC, en lien avec le MTESS ou le COUD-Génie TI, un programme d’alternance travail-études. Le développement de liens avec les établissements universitaires est « un créneau prioritaire dans notre plan stratégique », a ajouté la présidente. Un dossier à suivre.
Panel portant sur les conclusions des travaux de la CPMT
Manque de vision globale. Décalage entre l’offre et la demande. Culture de la formation continue déficiente au Québec. Difficiles arrimages entre les acteurs : plusieurs constats sont ressortis de l’étude menée par la CPMT sur la formation continue. Des enjeux qui touchent de plein fouet le secteur universitaire.
Si ces enjeux touchent aussi le monde universitaire, ils sont parfois même exacerbés, a expliqué Michèle Houpert, directrice du secrétariat de la CPMT. Pour illustrer cela, elle a donné l’exemple fictif d’un patron qui installe une nouvelle machinerie dans son usine. « Quand les entrepreneurs nous appellent, ils veulent être soutenus pour filmer une capsule l’après-midi et former leurs travailleurs pendant le quart de soir. » Une illustration, poussée à l’extrême, de la vitesse et de la rapidité réclamée par le marché.
Ainsi, les répondants ont tendance à croire que les universités ont du mal à suivre ce rythme, ajoute-t-elle. Un point d’autant plus sensible, dans un contexte où les changements vont à vitesse grand V. « Certaines entreprises développent leurs plateformes de formation, leurs propres institutions, alors que les cégeps et les universités pourraient répondre à leurs besoins, a souligné la directrice. Mais ce n’est pas un chemin possible dans leur tête. »
Pour Biba Fakhouri, vice-doyenne à l’innovation, aux communications et à la formation continue à l’Université de Montréal, en plus de l’enseignement et de la recherche, l’université a de multiples rôles. « La formation tout au long de la vie permet de rendre accessible une éducation de qualité pour tous, à la flexibilité des parcours. » Même si on reconnaît de plus en plus son importance, certaines difficultés persistent. « Quand on parle d’apprentissage tout au long de la vie en lien avec des parcours professionnels, on parle de savoirs qui se déploient à l’intersection des multiples disciplines. Alors pourquoi une faculté d’éducation permanente ne peut-elle pas travailler avec une école de gestion et la faculté des sciences de l’éducation pour offrir quelque chose qui ait du sens ? »
Pour cela, il faut parler la même langue, pense pour sa part Aileen Clark, directrice, division de l’éducation permanente de l’Université de Saint-Boniface. Un exercice y est d’ailleurs en cours pour déterminer quelles sont les compétences développées dans chacune des formations. « Nous avons été très mauvais à nous vendre ce que nous pouvons offrir, surtout en sciences humaines, dans un contexte de changement technologique. » En effet, il faut des professionnels pour réfléchir en entreprise aux aspects éthiques et philosophiques de ces changements en entreprise.
Bref, il reste encore du chemin à accomplir. « Il y a de la place pour le développement du savoir et certainement aussi pour d’autres conceptions de la formation universitaire », résume Aileen Clark.
Impact économique de l’apprentissage continu

Luc Lespérance
À l’heure actuelle, 50 % des tâches effectuées par les travailleurs canadiens pourraient être exécutées par la technologie. Une proportion qui risque de continuer de grimper avec l’utilisation de « technologies cognitives » comme l’intelligence artificielle, a expliqué Luc Lespérance, maître d’enseignement au département de technologies de l’information de HEC Montréal. Une tendance qui risque de modifier profondément le monde travail et de l’apprentissage.
À l’heure actuelle, plusieurs phénomènes ont une influence directe sur les compétences des travailleurs et la formation, a rappelé Luc Lespérance. Par exemple, plusieurs secteurs seront complètement transformés par la technologie. Déjà, le changement est en cours dans des domaines comme la comptabilité, a expliqué celui qui est aussi consultant à la firme comptable Deloitte. « En fait, avec des technologies comme l’intelligence artificielle, il est plus facile de remplacer un travail cognitif que manuel. » Autre exemple : l’arrivée de la voiture autonome risque de modifier le domaine du transport, ce qui pourrait créer un fossé avec certains travailleurs qui auront du mal à se requalifier.
Bref, « 65 % des enfants du primaire vont exercer un métier qui n’existe même pas encore, selon les données du World Economic Forum », explique Luc Lespérance. S’il faut prendre cette donnée avec un grain de sel, cela montre à quel point la courbe des changements est exponentielle. Et les individus, comme les travailleurs, ont du mal à s’adapter.

Benoit Dostie
D’où l’importance de la formation, a-t-il précisé. « La pénurie de la main-d’œuvre met aussi en relief l’enjeu des compétences, alors que les plus jeunes cherchent à se garder à jour, à développer leurs forces et à vivre des expériences. » Pourtant, 48 % des travailleurs estiment que leur niveau de compétences s’est peu amélioré dans les deux dernières années, a expliqué Benoit Dostie, professeur titulaire au département d’économie appliqué de HEC Montréal qui a présenté son analyse des données de l’Étude longitudinale et internationale des adultes (ELIA). Cette proportion est plus élevée qu’en 2014, alors qu’elle s’établissant à 39 %.
Autre constat : si les entreprises sont bien au courant de l’importance de la formation, elles sont plus réticentes à y investir, selon un sondage par Deloitte. En effet, 74 % des employeurs estiment que la reconversion de leur main-d’œuvre sera importante ou très importante dans les 12 à 18 prochains mois, cite Luc Lespérance. Toutefois, seulement 17 % d’entre elles se jugent incapables de prévoir les compétences du futur. Plus parlant encore, seulement 16 % des entreprises se disent prêtes à y investir considérablement au cours des trois prochaines années.
« Autrement dit, on vit dans un monde où tout va très vite, où on va devoir changer et s’adapter rapidement, mais très peu d’entreprises vont favoriser le développement de compétences », résume Luc Lespérance. Un défi d’autant plus grand dans les PME, qui manquent de temps et de ressources.
Bref, le monde universitaire doit donc se demander comment être acteur de ce changement et répondre aux « besoins criants de développement des compétences du futur », conclut Benoit Dostie.
Formation continue et reconnaissance des acquis

Rachel Belisle
La reconnaissance des acquis est parfois vue comme un synonyme de « diplôme au rabais », selon Rachel Bélisle, professeure titulaire à la Faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke. Au contraire, ce mécanisme « est une voie vers la diplomation qui favorise l’accessibilité ainsi que plus de justice sociale », a-t-elle souligné. Toutefois, il reste du chemin à parcourir pour que ce processus soit reconnu à sa juste valeur.
Meilleurs salaires, parcours plus courts, augmentation de la motivation, valorisation de l’expérience et des apprentissages : la reconnaissance des acquis offre de multiples avantages aux adultes en formation. « Ce type de démarche joue un rôle important sur la persévérance et la reconnaissance scolaires », a expliqué Évelyne Mottais, auxiliaire de recherche, Centre d’études et de recherches sur les transitions et l’apprentissage (CÉRTA) de l’Université de Sherbrooke. Les deux chercheuses ont effectué une recension des écrits à ce sujet et présenté leurs résultats aux participants.

Évelyne Mottais
Parmi les initiatives intéressantes à surveiller, la reconnaissance des acquis collectives, une pratique observée dans certaines organisations, surtout en France. Une façon de fidéliser la main-d’œuvre et de favoriser la mobilité interne, note Évelyne Mottais. « Dans ce type de démarche, le nombre d’abandons diminue et on obtient un meilleur taux de diplomation. » Cela facilite aussi les démarches pour les travailleurs, l’organisation de leur horaire et augmente leur motivation.
Dans ce type de contexte, les établissements d’enseignement peuvent aider les organisations à diagnostiquer leurs besoins, à cibler les programmes de formation, à établir un montage financer et à transmettre cette information aux travailleurs. « C’est une pratique qui est encore jeune qui se développe de plus en plus en France, mais les résultats semblent intéressants, puisqu’on constate que les gens persévèrent plus quand ils sont associés à une démarche collective », a mentionné Rachel Bélisle.
Plus globalement, la chercheuse estime aussi qu’il faudra renforcer la collaboration autour de la reconnaissance des acquis, que ce soit avec les autres établissements d’enseignement, mais aussi avec les organismes en lien avec le monde du travail. « Mais ce dialogue interétablissement n’est pas simple, puisque les intervenants sont nombreux, constate Rachel Bélisle. Il faut aussi développer un langage commun, ce qui s’avère complexe. »
En plus de créer des alliances, il faut aussi faire des efforts pour mieux faire connaître l’offre qui existe et mener des recherches pour étayer les connaissances sur ce mécanisme. « C’est un maillon important pour développer une culture d’apprentissage tout au long et au large de la vie » résume-t-elle.
Hommage à Denis Sylvain

Denis Sylvain à gauche et André Raymond, nouveau président de l’ACDEAULF.
Impliqué dans l’ACDEAULF depuis près de deux décennies, Denis Sylvain vient tout juste de prendre sa retraite. Les membres de l’ACDEAULF ont donc profité des Journées d’étude pour souligner l’apport de ce membre qui a su donner sa couleur à l’organisation. Pour souligner son apport important, le secrétaire-trésorier sortant a d’ailleurs reçu le statut de membre émérite.
C’est d’ailleurs avec un « petit pincement au cœur » que Denis Sylvain a reçu cet honneur. Il faut dire qu’il a joué une part active dans l’ACDEAULF, entre autres en augmentant les cotisations des membres pour offrir une santé financière à l’association. L’ancien directeur de l’Association générale des étudiants et des étudiantes de la Faculté de l’éducation permanente de l’Université de Montréal (AGEEFEP) a aussi participé à l’organisation de 17 journées d’étude, de Winnipeg à Moncton, en passant par Sherbrooke, a-t-il rappelé.
En plus d’avoir pris part à la création d’associations étudiantes d’adultes dans quatre établissements universitaires et de trois fédérations étudiantes, dont deux en lien avec l’éducation des adultes, il s’est aussi impliqué activement à l’ACDEAULF.
Celui qui a toujours eu à cœur le sort des étudiants adultes estime que plusieurs dossiers sont à surveiller, encore aujourd’hui. « Actuellement, il y a des pressions pour que le Canada inclue l’éducation aux adultes dans les traités internationaux, mais il ne faut pas céder à cette tentation, il faut être vigilant, a-t-il averti. Le monde de l’éducation est en changement, mais il faut changer cette impression que les universités sont au service des entreprises. »
Ne manquez pas, dans la prochaine édition de l’Infolettre, notre entrevue avec Denis Sylvain.
La formation continue à l’université : entre structure et conjoncture

Pierre Doray
Les étudiants adultes sont souvent invisibles, tant dans les communications publiques que dans les plans d’action gouvernementaux. Et, la pandémie n’a pas fait exception à la règle, a constaté Pierre Doray, professeur au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) qui a étudié comment cette crise a modifié le parcours de ces étudiants.
« L’idée de cette conférence m’est venue alors que j’étais en train de consulter le plan de réussite 2021-2026 du ministère de l’Enseignement supérieur. Je regardais les statistiques et il n’y avait aucune donnée sur les étudiants adultes dans les cégeps et les universités », a-t-il raconté. En lien avec un projet de recherche plus vaste sur les parcours des étudiants postsecondaires, lui et son équipe ont donc décidé de modifier leur angle pour voir si la pandémie allait modifier ces cheminements, grâce à des entrevues ainsi qu’à l’analyse du discours public.
« La pandémie est une crise majeure qui a créé d’importants bouleversements, mettant à l’épreuve les pouvoirs publics et les structures », a rappelé Pierre Doray. Entre la fermeture complète des écoles et le transfert à distance des activités d’enseignement, les établissements scolaires, y compris les universités, ont dû s’adapter à différentes phases. « Le discours public a aussi mis de l’avant la fracture numérique, que ce soit la difficulté entre les différentes régions ou les inégalités selon les groupes sociaux, a-t-il expliqué. L’idée, c’était de s’adapter aux besoins des étudiants et de répondre à tout un ensemble de demandes. » En filigrane, la concurrence n’a jamais été aussi vive, avec les grandes multinationales qui offrent maintenant de la formation en ligne.
La pandémie est aussi venue ébranler certaines certitudes, alors que les étudiants parents de l’UQAM ont revendiqué de ne pas avoir de cours obligatoire en soirée. Ce qui a été étonné le chercheur. « À la surprise de plusieurs, on a aussi remarqué que les inscriptions des étudiants adultes ont augmenté en 2020. Est-ce parce qu’ils avaient plus de temps ? Qu’ils avaient perdu leur emploi ? De la possibilité d’effectuer du télétravail ou de l’enseignement à distance ? » Les chiffres laissent aussi voir un certain recul en 2021, concordant avec le retour en classe des étudiants.
Malgré tout, les différentes instances qui réfléchissent à l’université de demain font souvent abstraction à cette réalité. « On reconnaît peu, voire pas du tout, la réalité des étudiants adultes et de leurs besoins particuliers. » Les établissements d’enseignement ont donc toute une réflexion à faire pour s’assurer que les modalités d’enseignement reflètent cette diversité de parcours. Et la pandémie aura permis de jeter un éclairage différent sur cette situation.
Retour sur les conférences et échange sur l’évolution des pratiques en formation continue universitaire
Entre l’offre de plus en plus grande, les difficultés à développer une culture de la formation continue, l’importante demande pour le développement des compétences, l’écart entre l’offre et la demande et la présence accrue du secteur privé, le monde universitaire devra faire face à plusieurs enjeux au cours des années qui viennent. La dernière activité des journées d’étude a permis de mettre en relief ces différents constats et de voir comment les établissements s’adaptent déjà à ces phénomènes.
« Il y a beaucoup de concurrence et la seule manière de faire compétition aux Google de ce monde, c’est de mettre de l’avant notre plus-value, c’est-à-dire nos experts », a expliqué Geneviève Gagné, directrice du bureau des études de l’UQAM. Cette nouvelle structure réunit sous un même toit le développement de programmes d’études, la gestion des formations non créditées et la formation hors campus. Une façon de briser les silos, a-t-elle expliqué.
Même si les travaux ont été ralentis avec la pandémie, son équipe réfléchit à différentes façons de créer des passerelles entre la formation créditée ou non. « On discute avec certaines unités pour créer des passerelles, par exemple en lien avec nos programmes de langues, a ajouté Geneviève Gagné. On collabore beaucoup pour éviter que les contenus de la formation non créditée nuisent à la formation créditée. En contrepartie, on essaie de mettre en place une reconnaissance d’acquis pour ceux qui veulent passer du non crédité au crédité. » Création de programmes gigognes, amélioration des outils de reconnaissances des acquis et création de gabarits plus légers font aussi partie de cette stratégie.
Si la concurrence est féroce, l’université a tout en main pour tirer son épingle du jeu, a expliqué pour sa part Philippe Trudel, directeur du Service de la formation continue et de la formation hors campus à l’UQTR. « Si Amazon déploie une formation en manutention, ils auront l’expertise pour le faire. Mais vont-ils offrir un cours en droit du travail ? C’est là que l’université peut être au cœur de ce déploiement, en traitant les enjeux éthiques et en étant garante de la science. » C’est donc sur ce plan que les universités peuvent livrer bataille, selon lui.
Le directeur travaille aussi sur le développement de passerelles entre la formation créditée ou non, notamment dans les créneaux d’excellence de l’université. « Des liens forts sont en train de se tisser. Notre souhait, c’est que ces liens puissent ouvrir les yeux, déconstruire les silos, sur le potentiel de croissance, de mise en valeur du corps professoral de notre université dans le déploiement de formation continue. »
Pour offrir une approche plus personnalisée, l’Université Laval a de son côté décidé de renforcer les liens entre employabilité et formation continue, a rappelé André Raymond, directeur du Service du développement professionnel de cet établissement et nouveau président de l’ACDEAULF. Plus concrètement, le service de placement et la direction générale de la formation continue ont été regroupés, « dans une perspective d’apprenant à vie. »
Face à toute l’offre, aux choix qui se déploient et aux nouvelles perspectives, c’est une façon d’aiguiller les étudiants et les diplômés vers la formation qui leur convient le mieux en fonction de leur profil et de leurs besoins. Une approche personnalisée à développer. « C’est toutefois complexe, alors que les facultés peuvent aussi créer leurs propres formations. On peut donc voir deux facultés proposer le même type de contenu, mais selon un angle différent, un mode de livraison différent et à un prix différent », a-t-il expliqué.
Des solutions qui apportent toute un éclairage différent à ces questions. « On ne pourra pas gagner seul cette bataille, il va falloir réfléchir à une approche plus collective. Car ensemble, nous avons une masse critique », a souligné Philippe Trudel. Et une organisation comme l’ACDEAULF constitue le véhicule parfait pour travailler de concert, ont conclu les présentateurs.